Nous suivons avec beaucoup d’intérêt l’évolution du domaine de la mode inspirée d’Afrique ou faite par des créateurs afro. De notre point de vue, l’évolution de ce secteur repose :

  • d’une part sur l’industrie en elle-même de manière intrinsèque, avec les marques et designers : qualité des produits, circuits de distribution, rapport qualité/prix, image de marque et marketing
  • mais d’autre part, sur l’accueil par le public.

Sur ce second point, on peut compter sur la présence d’influenceurs noirs de qualité qui s’investissent dans la promotion de cette mode et plus généralement de entrepreneuriat afro. C’est le cas de Scheena Donia avec qui nous entretenons aujourd’hui.

Scheena Donia a plusieurs casquettes, si bien qu’il est difficile de la décrire en quelques mots. A la fois blogueuse, consultante en image, consultante marketing, activiste, cette jeune maman d’origine gabonaise vit à Paris.

Retenons surtout que Scheena s’investit énormément dans la promotion des business de créateurs afro et c’est à ce titre que nous lui donnons la parole, pour s’exprimer sur sa vision des choses et nous partager son actualité et ses coups de cœur du moment.


Pour les lecteurs qui ne vous connaîtraient pas, pourriez-vous vous présenter ?

Je m’appelle Scheena Donia, je suis consultante en image et business. J’accompagne depuis 2004 des hommes et femmes désireux de soigner leur image personnelle ou celle de leurs marques, produits et services pour plus de succès. Je propose pour cela des coachings individuels en ligne ou des ateliers de groupe sur les thèmes de l’image, du business mais aussi de la confiance en soi, le mental étant un atout indispensable à notre réussite.

Je suis également très présente sur les réseaux sociaux où je partage mon quotidien d’entrepreneur, maman de quatre enfants et mon lien très fort avec l’Afrique. Si vous revenez assez souvent, vous découvrirez mon amour pour la terre mère à travers des créateurs, la musique, la cuisine, l’art et mes voyages gré de mes publications. L’objectif étant d’inciter le plus grand nombre à acheter, soutenir, encourager, promouvoir des marques Made of Africa et d’en faire une manière de vivre et de consommer. 

Tee-shirt The Kure Project, boucles Imane Ayissi, bague Valeri Christina
© Horonce H photgraphy

Vous faites justement partie des influenceuses basées à Paris qui s’investit beaucoup pour la cause des entrepreneurs Afros. Pouvez-vous nous indiquer vos domaines de prédilection ?

La mode et l’entrepreneuriat sans aucun doute. Depuis 5 ans, je veille à porter tous les jours au moins une pièce d’un créateur afro, qu’il s’agisse d’un vêtement ou d’un simple accessoire. J’essaie de tordre le cou à l’idée (vraie) selon laquelle un dollars met quelques minutes à quitter la communauté noire pendant qu’il met un mois à sortir de la communauté asiatique. Plus nous achèterons « noir » de manière consciente, plus nous permettrons à nos créateurs et entrepreneurs de prospérer à défaut de survivre. La grande vision est de créer des emplois, protéger des savoir-faire artisanaux en voie de disparition parfois, permettre à des hommes et des femmes qui ont eu le courage d’entreprendre de participer à la croissance de nos économies et plus encore. En étant des centaines ou des milliers à acheter une robe Tongoro par exemple, ce sont des tailleurs à qui nous permettons de subvenir aux besoins de leurs familles, d’envoyer un fils à la faculté de médecine et demain de sauver des vies dans un hôpital auquel il sera affecté. The big picture est toujours lus grand que nous. Et je m’assure de le répéter autour de moi.

« Moins de Chanel, plus de Made of Africa« 

Le problème c’est que très souvent, plus nous avons d’argent dans notre communauté, plus nous voulons montrer notre force de frappe financière hors de celle-ci. 

Ensemble by Natacha Baco ; Sac Tongoro
© Badara Preira
Robe We are nash studio ; sac Yeba essentials ; bague Valeri Christina

Comment percevez-vous l’évolution de la mode afro ? Pensez-vous que les choses vont dans le bon sens, ou qu’au contraire on piétine ?

Bien sûr qu’on a évolué. Il fût une époque où l’on n’avait que le choix entre le tailleur et une sélection de grands designers Afro qui défilaient au Fima et dont on pouvait voir les créations dans les magazines Amina ou Divas. Alphadi, Pathé Ô, Gilles Touré, Collé Sow Ardo… Encore fallait-il pouvoir se permettre leurs créations sinon, direction le tailleur à nouveau pour s’offrir quelque chose de ressemblant.

Robe Zadada Fashion ; sac Tongoro; sneakers Maison Chateau Rouge
© Dzees

Aujourd’hui, la mode africaine s’est démocratisée et rendue plus accessible grâce à internet et à l’engouement de plus en plus de jeunes créateurs à habiller monsieur et madame tout le monde. Mais si l’offre et la demande sont là, la distribution pêche toujours. C’est très souvent un parcours du combattant pour faire arriver une pièce dans nos dressings. C’est à ce niveau que des efforts doivent être consentis non seulement par les marques elles-mêmes mais aussi les revendeurs intermédiaires. Nous sommes nombreux à vouloir acheter mais où trouver ces pièces autour de nous ? Qui a envie d’attendre des semaines pour une robe quand Asos livre en 24h et Zara est au coin de toutes les rues ?

Scheena et sa fille Paloma, en robe Nanawax
© Sébastien Faye

Vous encouragez régulièrement tes followers à soutenir les marques. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi cela vous tient autant à cœur ?

Pour permettre à nos créateurs de vivre de leur métier ce qui n’est pas le cas de tous. Pour créer de la valeur, des emplois, participer à la croissance du tissu économique et à la liberté financière des nôtres, protéger des textiles et savoirs-faire artisanaux en voie de disparition, susciter des vocations dans les métiers de la création, donner naissance à une véritable industrie de la mode qui est estimée à des milliards ailleurs dans le monde. Je me souviens d’une conversation avec le créateur Elie Kuame de Côte d’Ivoire dans laquelle il disait que dans la mode, il y a un peu de 70 métiers bien distincts, 70 ! Vous imaginez les possibilités en terme de créations d’emplois si nous les développions ? Les gens auront toujours besoin de s’habiller mais jusqu’à quand allons-nous laisser à d’autres le privilège de nous vêtir ? Et jusqu’à quand allons nous donner notre argent à des grandes enseignes qui sont déjà suffisamment riches pendant que les nôtres, pourtant talentueuses, essaient ne serait-ce que d’exister ? Ces maisons que nous rendons encore plus ont déjà sécurisé l’avenir des petits enfants de leurs enfants. Nos créateurs se demandent comment ils vont boucler les fins du mois très souvent. Si on rajouter à cela le Covid et la crise financière qui va s’en suivre, nous avons plus que jamais le devoir de soutenir ces petites marques qui sont faites par nous et pour nous. 

Pouvez-vous nous parler de vos projets à venir ? Peut-être le film en préparation ?

Oui, plusieurs projets dont l’écriture d’une comédie romantique qui sera tournée en Afrique bien évidemment, avec un quatuor d’actrices habillées tout le long du film par des marques afro évidemment et qui donnera une raison de plus d’être fière d’être Made of Africa. Je me souviens qu’aux USA, après la diffusion de chaque nouvel épisode de Sex in The City, les sacs, chaussures ou robes qui avaient été placés dans l’épisode de la veille étaient souvent sold-out dès le lendemain dans le pays.C’est l’une des ambitions du film mais pas que. Cela reste une comédie et l’objectif est faire passer un bon moment au public en abordant des sujets dans lesquels je sais que nous nous retrouverons. Et parait-il, j’ai mon petit secret pour faire rire à travers des hashtags hilarants sur Instagram. Nous allons transposer tout cela dans une production audio-visuelle qui sent bon la mode, l’amour, l’humour, la musique et l’Afrique. Il y a également d’autres projets en cours visant à connecter les marques avec les acheteurs et je me fais une joie de revenir vous en parler très vite. 

Robe  Grace Wallace
© Horonce H Photography

Merci Scheena pour cet échange très instructif. C’est passionnant de vous écouter partager sur vos centres d’intérêt et les sujets qui vous tiennent à cœur. Il ne reste plus qu’à vous souhaiter bon courage pour la préparation de cette comédie à laquelle nous souhaitons par avance un plein succès !

Si ce n’est pas encore le cas, empressez-vous de suivre Scheena sur ses réseaux sociaux Instagram Scheena | Twitter Scheena. Vous découvrirez son univers pétillant tout en apprenant et découvrant de nouvelles choses.

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